Le sifflet


de

De l’Université de Rennes aux plages de Dinard…

Regards croisés sur le viol, le harcèlement, les violences conjugales où se mêlent la voix des victimes et celle de leurs agresseurs.
Sept protagonistes prennent tour à tour la parole, donnant chacun son ressenti, sa version des faits. De nombreux sauts dans le temps permettent, au fur et à mesure de la lecture, de faire des liens, d’éclairer certains passages, jusqu’au dénouement final.

Extrait 1 :

« Je ne me souviens pas exactement, monsieur le président… J’ai entendu des rumeurs sur un professeur de la fac, toujours le même, je ne connaissais même pas son nom jusqu’à il y a quelques jours mais c’étaient le même surnom, plus ou moins les mêmes histoires, plus ou moins déformées qui revenaient. Des gens à la fac ou dans les sorties étudiantes racontaient que « Chaud-chaud » avait coincé une-telle à la fin du cours, qu’il faisait des compliments sur des décolletés, des critiques sur les « boudins » (le terme qu’il emploie, apparemment, c’est pas de moi) qui portaient des vêtements moulants en rageant que ça devrait pas être permis. On m’a raconté qu’il faisait des blagues aux étudiantes qui portaient le voile, du style : « Ben dis-donc
vous n’êtes pas encore mariée ? Pourtant dans votre pays c’est à partir de 11 ou 14 ans non ? Moi si j’étais à leur place je n’hésiterais pas ! Dites, si vous avez besoin d’aide pour vous maquer, vous savez je suis une âme charitable… Toujours prêt à rendre service ! » »

 

Extrait 2 :

« Là il s’approche un peu trop près mais bon ça va, le rhum est pas mauvais, c’est déjà le troisième. Et puis, comme d’hab, la conversation est intéressante. Mais il commence à changer la donne, il donne le la en attaquant là, ouh la, il est marrant avec ses gros sabots à vouloir encore m’embrasser – mais bon faudrait pas abuser non
plus. Va falloir dire stop, là.
Putain, il me tient grave, il veut plus me lâcher – je le pousse mais il est plus fort que moi, il m’a carrément aplatie sur le sofa et il sort sa queue, il me tient par la
nuque et me pousse vers son truc, c’est vraiment pas beau, après Lucie hier soir ça fait pas envie. Bon, allez, ferme les yeux, c’est un mauvais moment à passer c’est tout, sucer son prof c’est pas la mort non plus. J’ai la tête qui tourne, il halète, ça gonfle, ça va sortir… manquerait plus que ça… Je fais un effort pour dégager ma tête.
-Ça va pas non, finis le travail merde !
-Connard ! Et tu crois que je vais avaler en plus ?! »
Je me débats, des coups de poings et de pieds, ça doit le surprendre parce que même s’il est quasi deux fois plus lourd que moi il me lâche.
Je l’entends dégringoler les escaliers à ma suite, avec un temps de retard. Il jure. Il crie mon nom.
Je fonce à l’arrêt de bus. Coup de chance : il y a une femme avec une poussette et un jeune avec des écouteurs qui secoue la tête en rythme.
Steinelbach : disparu. Je ne vois rien, je ne pense rien.. »

 

Vé Erre est le pseudonyme d’un jeune romancier.
Jeune chercheur, il passe actuellement plusieurs concours pour enseigner.
Son premier roman est un roman coup de poing, au caractère sombre et rebelle. Son écriture va à l’essentiel.
Il publie également un essai sur la question Trans, Trans-percer les clichés  aux éditions Goater en décembre 2018.

Photographie de couverture : Marie Le Marchand.

Prix: 18 €


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